Tout avait changé.
Depuis quelques jours, lentement, mais surement, tout semblait s'altérer tout auprès de lui. Après une longue descente en enfer, persécutés de missions aussi ringardes et désespérantes les unes que les autres, il semblait enfin approcher de la fin du tunnel. Une lumière éblouissante le tirait doucement des épaisses ténèbres qui lui servait de compagne depuis sa déchéance, depuis son échec cuisant. Ce souvenir douloureux s'estompait de jour en jour, le chemin de la rédemption s'acheminant de minutes en minutes vers sa fin. Depuis l'attaque subie par Konoha par un drôle de groupuscule surnommé Shikatsuki, s'il avait bien suivi, son nom était passé sur la quasi totalité du village. Le peuple savait ce qu'il avait accompli. Et cela se ressentait. Les visages étaient souriants sur son passage, là où quelques semaines un simple grognement n'aurait pas même été émis. L'être humain était-il si changeant, ou simplement hypocrite ? Les deux, surement. Mais, pour sa part, la cerise sur le gâteau de la nouvelle nomination dont l'avait affublé l'Hokage était sans nul doute les missions dont il devait s'occuper. En effet, celles-ci étaient maintenant bien plus prenantes et enrichissantes que celles qu'il avait du se coltiner depuis de si nombreuses années. Adieu malédiction à la mord-moi le nœud. Son existence en tant que véritable shinobi de Konoha commençait peu à peu à se développer, laissant devant lui une bonne augure. Il le sentait. Bientôt, il pourrait demander la faveur de devenir Chunin, et atteindre ainsi bien plus de responsabilité. En attendant, il devait se calmer, garder la tête froide et les pieds sur terre. En cet instant, une nouvelle mission l'attendait, et il se devait d'être irréprochable. Il ne voulait pas regoûter à l'échec. Plus jamais.

Le calme s'était installé dans les couloirs de l'Académie.
Cela faisait maintenant 3 ans qu'il avait quitté les bancs de l'Académie. Pourtant, son pas restait sûr parmi le dédale des couloirs fortement éclairés, jouxtés d’innombrables portes donnant sur des salles de classes. Avec l'assurance d'un ancien retrouvant son passé, il se dirigea vers la salle principal, installée en gradin, où, enfant, il avait prit l'habitude de s'endormir. Son cœur vrombissait à chaque enjambée, les souvenirs fluctuants dans sa tête. Ces nombreuses heures à sécher les cours, flanqués de ses joyeux compagnons, avant de se faire choper et de subir la punition générale dans le rire. Aux cours des nombreux détours, il se souvint de chaque malice qu'il avait créé, de chaque passage secret. Alors il soupira. Le temps de l'insouciance était loin, et il devait se montrer rigoureux et sérieux maintenant. Alors, enfin, il déboucha dans la salle, le professeur principal se tournant vers lui, un large sourire aux lèvres :

Aaah, les enfants, je vous demande d'accueillir comme il se doit un ancien de vos condisciples : Nara Sôkaku. Il a fait partie des valeureux shinobis à avoir tenu tête à l'incendiaire d'Ichiraku. Bien sûr, il n'est encore que Genin, les deux autres héros étant trop important pour un simple cours... Mais gageons qu'il vous apportera aujourd'hui la connaissance qu'il vous faudra ! Nara, c'est à toi !

La dernière phrasée fut dite en aparté, à voix basse par le vieil homme à la moustache lourdement fournie. S'approchant de lui, Sô eut le loisir de sentir l'odeur tenace de cigare qui s'échappait de l'homme, toussotant sous le fort arôme, se raclant la gorge afin d'éveiller sa voix à une intonation bien plus forte qu'à la normale, il leva les yeux vers l'assemblée... et ce fut le vide. Ce nombre impressionnant de visage tourné vers lui le déstabilisa. Il n'était pas habitué à ça. Parler devant autant de monde le fit gravement flipper. Son coeur s'emballa, le stress s'élevant dans chaque pore de sa peau, sa respiration irrégulière, pressée, fut perçue par le Sensei, qui vint à son aide. Lui laissant le temps de se remettre de ses émotions, expliquant le plan de la journée. Enfin, il fit un léger signe au maître d'école, signifiant qu'il était prêt. Une interminable série de question réponse-commença alors. On lui parlait beaucoup des valeurs que devaient avoir un shinobi, ainsi que de ses croyances personnelles. sans mâcher ses mots, le Nara leur parla comme s'il parlait un égal, pensant que c'était la meilleure méthode afin que ces jeunes gens se sentent concernés, mais surtout respectés. Après avoir défini ce qu'était un shinobi, ainsi que ses rapports au village et à ses pairs, ils dévièrent sur l'attaque de Konoha. Se questionnant beaucoup sur le danger inhérent au métier. Comment cela faisait-il de se trouver dans un match à mort ? Bien sur, cette discussion fut difficile à entretenir avec une bande de bambins... Mais n'était-il pas là afin de les préparer à la vie de shinobis, qui n'était pas faite que de beaux combats rutilants, avec des enchainements de ninjutsu aussi spectaculaire les uns que les autres ? Non. Il se devait de montrer les envers du décors. La mort, la douleur et la tristesse était le fardeau quotidien du shinobi. Et si, parmi ses enfants encore plein d'avenir, cette perspective les effrayait, alors il était encore temps qu'ils quittent leur fantasme, afin de se mêler à une vie active, au lieu de gâcher la leur inutilement.

Un raclement de gorge les surprit tous.
Le responsable de classe semblait se lasser tout doucement du long débat qu'ils venaient d'entamer. Pointant sa montre, il déclara qu'il était l'heure de l'entrainement, faisant signe à tous de sortir de leur pupitre, et de le suivre dans la cour intérieure, réservée aux entrainements d'arme de jet. Sô' n'avait jamais excellé dans cet art. Mais ce n'est pas pour autant qu'il figurait telle une quiche en fin de liste aux examens. L'arme allait toujours dans la bonne direction, c'était déjà ça, va-t-on dire. Une fois les élèves répartis sur la terrasse, il prit un kunai, tentant de le montrer à tous, expliquant scrupuleusement, telle une encyclopédie : le kunai était donc une lame en forme de feuille et comportait une poignée avec un anneau sur le pommeau pour attacher une corde. Ceci permettait au kunaï d'être attaché à un bâton comme une lance, ou d'être attaché et caché le long du corps, ou encore de le récupérer lorsqu'il était utilisé en tant qu'ancre ou piton. La taille de la plupart des kunaï allait de 20 centimètres à 60 centimètres, avec une moyenne de 40 centimètres[Merci Wiki ♥]. Après son petit discours, il fit aller dans les airs le kunai, avant de le récupérer sur son doigt, démontrant ainsi que ceux-ci étaient bien souvent lestés et équilibrés. S'ils n'étaient pas aussi précis que les shurikens pour le lancer... Leur poids leur permettait de faire bien plus dégâts ! Prenant l'arme entre ses doigts, il le fit légèrement tournoyer avant de le lancer vers une planche, n'atteignant pas le milieu de la cible, mais n'en étant pas fort proche. Il leur expliqua aussi que les meilleurs manieurs de cette arme si particulière étaient capables de les faire ricocher entre eux dans les airs, afin de surprendre un adversaire, ou d'en atteindre un hors de portée, à couvert. Clapant alors ses mains, il les laissa s'entrainer gentiment, donnant divers conseils à ceux qui semblaient particulièrement galérer, réprimant les petits excités qui mettaient leur camarade en danger en ayant la bougeotte facile.

La fin du cours approchait.
Reprenant leur attention, il leur fit part d'un de ses conseils et astuces personnel ! Prenant le vieux professeur comme adversaire factice, il lui fit un grand sourire, avant de balancer à toute vitesse une de ces armes mortelles, la lançant visiblement avec une certaine malhabilité, le projectile passant loin au-dessus de sa tête, retenant l'attention du vieillard, peu habitué à ce genre de raté. Alors qu'il essaya de redescendre le cou, il se sentit paralysé, son corps ne lui appartenant plus. Soudain, il se sentit se placer devant les enfants, droit comme un i, une main dans le dos, alors que sa main gauche bougeait aux mesures de la voix du jeune Nara à ses cotés, semblant faire les mêmes mimiques que lui :

Vous voyez, les enfants. Les armes ninjas n'ont pas qu'un but offensif défini par leur propriété. Avec un peu d'ingéniosité, ils peuvent vous servir à pièger l'ennemi, en le distrayant, ou faisant se mouvoir là où vous le souhaitez ! Alors, si vous avez bien compris la leçon, je vous promets une vie longue, et plus sécuritaire... Le cours est fini. Une bonne soirée à tous...

L'homme sent alors récupérer l'usage de son corps, l'ombre du Genin revenant auprès de son propriétaire. La leçon avait été magistrale. Un vrai spectacle, comme l'aimait les enfants. Leur attention avait été optimisé, ainsi, et c'était exactement ce qu'il fallait. Doucement, dans sa tête, il vit le jeune Cerf s'en aller, se disant que, tout compte fait, peut-être devrait-il revoir un peu ses méthodes... Et les rendre bien plus imagés comme il en avait été durant cette journée.