Dans quel enfer s'était-elle plongée de son plein gré ? Qui étaient tout ces démons juvéniles, tout autant d'ennemis que d'élèves à encadrer le temps d'une journée ? Elle n'en connaissait pas la plupart, sans doutes était-ce le résultat de cet entraînement personnel dans le cadre de son passage au grade supérieur. Et maintenant qu'elle possédait fièrement mais pas ostensiblement de quoi prouver qu'elle était chuunin, elle se demandait si elle avait bien fait de terminer avec succès l'examen... Elle se tenait désormais à la place habituelle de leur senseï, mais ce dernier semblait avoir eu quelques problèmes suite à une mésaventure de plus... Mais même si cela s'annonçait particulièrement difficile, elle n'aurait qu'à s'afficher avec un grand sourire, faire preuve d'une patience exemplaire, éventuellement répondre aux questions des élèves les plus curieux de comprendre les méandres des arts ninjas... Rien de bien compliqué en somme, rien que ne soit si insurmontable que ça.

« Madame, ce sont des vrais ? »

Elle ne l'avait pas remarqué, perdue dans ses divagations et ses questionnements, ce petit enfant à l'air si innocent mais tout autant pervers et fourbe. D'un doigt potelé et d'un air particulièrement malsain, il pointait la poitrine de la jeune femme sans pour autant garder ses distances. Au contraire, il se rapprochait dangereusement, comme si le regard menaçant et l'air gêné d'Amane ne suffisait pas à démotiver le plus tête brûlé des pervers juvéniles. Le premier contact entre l'élève et la senseï d'un jour fut on ne peut plus ferme et doux, avant de virer à un cauchemar apocalyptique, une aura malfaisante entourant la jeune femme. Un halo de flammes infernale et de courroux divin suinta alors de chacune de ses paroles les plus acérées à l'encontre de l'enfant, allant même jusqu'à choquer le reste de la classe par tant d'images et de propos. Cependant, c'est le regard amusé du jeune garçon qui déclencha cette même colère, ajouté à ces quelques mots, rongés de mensonges, qui causa une moquerie générale. Lentement mais sûrement, la senseï perdait pied.

« Mh, je suis catégorique, ils sont faux ! »

Le coup qui partit suite à ce pic, quant à lui, ne fut aucunement frappé du sceau de la traîtrise. Sèche et brutale, elle avait lancé son poing dans le visage du pervers, l'envoyant valser le long de la salle sans sommations. Elle plaqua alors ses mains sur le bureau face à elle, profitant du silence de terreur qu'elle avait ainsi instauré. Elle pointa une paire d'élèves et leur intima d'aller récupérer leur camarade et de l'installer sur sa chaise respective le temps que ses spasmes se calment. Étrangement, aucun des deux n'opposa de résistance à leur senseï, preuve que ce petit interlude avait eu l'effet escompté. Ainsi ils descendirent sous le regard perçant d'Amane, récupérèrent le dissident et le collèrent à sa place sans mot dire, laissant la jeune femme commencer son cours.

Le reste de la journée fut particulièrement calme, en comparaison avec le début fracassant. La détentrice de l'oreille absolue n'eut aucuns scrupules à jouer de la gâchette pour convaincre les plus réticents de garder le calme, et tous purent profiter d'un moment de silence, où seul le bruit de la craie sur le tableau venait rompre le tout. La matinée se passa ainsi dans le plus grand calme, tandis que l'après-midi, Amane revêtait un tout autre visage. En effet, elle pensait que ces bambins étaient particulièrement pénibles du fait qu'ils ne pouvaient passe dépenser autant qu'ils le voulaient. Aussi elle parut plus chaleureuse lorsqu'elle leur proposa de mettre en pratique le cours de la matinée. S’enchaînèrent alors quelques combats à mains nues, des lancers de projectiles divers et variés sous l'oeil avisé de la jeune femme et ses conseils toujours plus pertinents que les précédents. Les élèves progressaient à leur rythme, et une petite solidarité s'installa entre les plus doués et les moins talentueux, arrachant par la même occasion le premier sourire de la journée à la messagère du cœur.

Le soir venu, et après avoir remercié les enfants de la bonne journée qu'elle avait pu passer à leurs côtés, Amane s'en retourna auprès des commanditaires de cette aventure. Ces derniers, particulièrement impressionnés par les capacités à commander et imposer le respect -par des méthodes tues pour ne pas ternir cette bonne impression- la payèrent sans plus tarder. C'est donc le cœur léger et les poches pleines que la jeune femme se coucha, repassant sa journée et s'amusant de ses expériences venues. Car avec le temps, tous les souvenirs finissaient par ne montrer que de bons côtés. Pourquoi cette journée échapperait-elle à ce vieil adage?